Embouteillage au quai de phosphate de El Aaiun occupé
En quelques jours, ce début octobre, plus de 100 000 tonnes de phosphate sahraouis ont été expédiées loin du territoire colonisé. Les phosphates ont été extraits et vendus par l’occupant, le Maroc, à son propre profit. En septembre, les navires Ultra Dynamic et Ultra Crimson, avaient déjà emporté une quantité similaire de phosphates sahraouis. Un suivi attentif des informations internationalement disponibles, ainsi que des contrôles de visu ont permis à Équipe Média d’établir les présents constats.
Le 3 octobre 2017 le bateau Glovis Madrid. imo 9610999, pavillon Singapour, en provenance de Bremen, est arrivé à El Aaiun. Son tirant d'eau était alors de 6,7 m et son maximum possible de 12,85m, son port en lourd 56 605 tonnes.
Le vraquier chargé de phosphate est reparti dans la nuit du 5 au 6 en direction du canal de Suez, qu’il est estimé atteindre le 15 octobre prochain. Son tirant d’eau était alors de 12,9m.
Selon les informations qu’Équipe Média a pu trouver, son propriétaire est PST Management de Singapour, et son gestionnaire Pacific International Lines de Singapour.
Le soir du 4 octobre, le Panagiotis,(ex MaverickGunner), Imo 9461063, pavillon des îles Marshall, en provenance de Hadera (Israël) est arrivé au large de El Aaiun avec un tirant d'eau à 7m. Son port en lourd est de 80 717 tonnes. À son départ d’El Aaiun le 8 octobre, chargé de phosphates, son tirant d’eau était de 11m. Il se dirige vers South West à la Nouvelle-Orléans, Usa.
En 2002, l’avis juridique du Secrétaire Général adjoint des Affaires Juridiques du Conseil de Sécurité de l’ONU, Hans Corell, prévenait déjà que les activités d’exploration et d’exploitation, si elles continuaient à être menées à bout sans répondre aux intérêts et désirs du peuple du Sahara Occidental, iraient à l’encontre des principes juridiques internationaux applicables aux activités concernant les ressources minérales dans les Territoires non autonomes.
En décembre 2016, la Cour de Justice de l’Union Européenne nous a rappelé une réalité qui semblait oubliée. Elle a décidé en seconde instance que l’accord de libéralisation entre le Maroc et l’Union Européenne n’était pas applicable au territoire du Sahara Occidental vu qu’il s’agit d’un territoire non autonome devant exercer librement son droit à l’autodétermination, un territoire avec un statut séparé et distinct, et vu le principe relatif des traités selon lequel les accords ne doivent ni nuire ni profiter à des sujets tiers sans leur consentement. C’est-à-dire, les considérants de la sentence concernent n’importe quel contrat d’achat avec le Maroc de produits du Sahara Occidental.
Seul l’accord des autorités sahraouies, soit le Polisario, rend possible l’exploration ou l’exploitation de ces ressources. C’est-à-dire que les entreprises qui exploitent ou utilisent les phosphates peuvent être désormais poursuivies devant les tribunaux.
Au début de cette année, un bateau chargé de 55 000 tonnes de minerai de phosphate en provenance du Sahara Occidental a été arrêté par la justice sud-africaine, après l’alerte du caractère illégal de sa cargaison. La procédure ayant été jugée recevable, et le procès légitime, l’OCP, exploitant marocain des phosphates sahraouis, a décidé d’abandonner sa défense de la cargaison, peinant probablement à trouver des arguments justifiant son pillage.
En juin dernier, WSRW, observatoire international des ressources du Sahara Occidental a publié un rapport dans lequel se trouvent tous les navires qui ont chargé et emporté du phosphate sahraoui depuis El Aaiun, pour la période du 1er janvier 2016 au 9 juin 2017. S’y trouve aussi une estimation des quantités transportées, ainsi que les informations administratives. (http://www.wsrw.org/a111x3929)
Au moment de la publication de cet article, le SBI Tango, Imo 9714707, pavillon des Îles Marshall, port en lourd de 61 192 t, est amarré au quai de chargement de phosphate à El Aaiun. S’il charge lui aussi plus de 50 000 t, cela fera plus de 150 000 tonnes de phosphate expédiés du port d’El Aaiun en une semaine.
La haute surveillance militaire et policière du port d’El Aaiun par le Maroc rend difficile le travail des journalistes, qui n’ont pas l’autorisation d’y accéder pour photographier ou enquêter.
ÉquipeMédia. El Aaiun, Sahara Occidental occupé
Le 11 octobre 2017
Ahmed Ettanji
Mohamed Mayara
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